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Chien de détection formé pour pister la maladie

Avec leurs 220 millions de récepteurs olfactifs, les chiens de détection sont des coéquipiers d’exception pour les forces de l’ordre. Ils signalent les personnes disparues, détectent les explosifs et luttent contre le trafic de drogue. Héros nationaux, ils sont aussi éduqués pour l’assistanat de handicaps tel que la cécité, l’épilepsie, le diabète. Aujourd’hui, de nombreuses études scientifiques démontrent que le chien de détection formé pour pister la maladie décèle les pathologies bien en amont des premiers signes cliniques. Une révolution dans le domaine de la santé, qui permettrait de sauver de nombreuses vies grâce à un diagnostic précoce. Quelles affections peuvent-ils prévenir ? Covid 19, cancer… Le museau canin peut-il réellement dépasser l’imagerie médicale, ou combler l’absence de médicaments ? On vous explique comment notre compagnon préféré est en passe de devenir l’outil incontournable de la recherche thérapeutique.

Chien de détection formé pour pister la maladie - Le blog du hérisson
©Laetitia Poncet

Le chien de détection formé pour renifler la covid-19

En pleine crise sanitaire, le flair du chien rivalise sérieusement avec le test PCR pour détecter la coronavirus. L’étude Nosaîs-Covid-19 est menée par l’ENVA (école nationale de vétérinaire d’Alfort)  et le professeur Dominique Grandjean. Son but est de démontrer que les personnes atteintes par cette infection, génèrent un effluve particulier décelé par des chiens entraînés. Dans ce protocole, huit canins ont donc été dressés pour mémoriser le marqueur olfactif du virus. Ces derniers ont ensuite réalisé 368 essais. L’animal devait renifler sept entonnoirs en aluminium contenant des échantillons de transpiration. Les premières données prouvent qu’il existe bien une odeur positive sur les personnes ayant contracté la Covid-19. Selon leur publication, les résultats sont probants :

  • quatre chiens ont atteint les 100 % de réussite ;
  • deux d’entre eux parviennent à reconnaître 98 % et 94 % des échantillons contaminés ;
  • les deux derniers renifleurs identifient 84 % et 83 % des effluves infectés.

La capacité des truffes canines à diagnostiquer un patient atteint du coronavirus est donc confirmée. A terme, selon le docteur Grandjean, les chiens de détection seraient utilisés aux frontières, sur les bateaux, ou dans les aéroports. Ils permettraient de diriger les populations en transit sur notre territoire vers un test PCR en fonction d’une odeur positive ou négative au virus. Une approche déjà utilisée aux Émirats Arabes Unis dans les aéroports.

Ces premières expériences prometteuses ont permis de débloquer 200 000 euros en soutien de l’OMS. Une avancée scientifique qui rend frileux les lobbys pharmaceutiques selon le docteur Grandjean. Ce type de dépistage serait économique. Contrairement aux 75 euros du test PCR, utiliser l’odorat des chiens ne reviendrait qu’à un euro par personne. Enfin, le contrôle est sans douleur pour les patients et le résultat est instantané.

Le flair canin entraîné pour dépister le cancer du sein

Selon L’OMS (Organisation Mondiale de la Santé), en 2020, 2.2 millions de femmes étaient atteintes d’un cancer du sein. C’est le cancer le plus courant. Détecté tôt, on peut en guérir 9 fois sur 10.

Le projet KDOG de l’institut Marie Curie est donc un défi de taille. Le docteur et infirmière Isabelle Fromantin veut élaborer un protocole simple, économique et non-invasif du dépistage du cancer à son stade le plus précoce. D’après ses recherches, la peau des femmes touchées par cette pathologie libère une odeur spécifique imperceptible par l’homme. Ces composés volatils modifiés par la présence de la tumeur peuvent être détectés par les malinois ou labradors renifleurs.

Entraînés par une équipe cynophile, à flairer le cancer, ils sentent des lingettes mises en contact avec la peau et la sueur des femmes. Le taux de réussite de 90 % est très encourageant et a permis de débuter l’étude clinique en mars 2020. Son objectif est de vérifier si cette technique de dépistage est reproductible et constante. Ce protocole doit être validé sur un panel de 450 patientes.

L’odorologie canine, utilisée comme moyen de diagnostic précoce et non-invasif des tumeurs, est un axe de recherche international. La communauté scientifique expérimente les capacités olfactives surprenantes du chien pour différents types de cancers :

  • des poumons ;
  • de la peau ;
  • de la vessie ;
  • des ovaires ;
  • ou encore de la prostate.

Selon Uri Yoel, chercheur à l’université Ben Gourion du Néguev, en Israël, les chiens dressés pour reconnaître des cellules mammaires tumorales sont également capables de sentir avec succès d’autres types de cellules cancéreuses. On peut donc supposer que le composé volatile reniflé par les canidés serait le même pour tous les cancers.

Reconnaître une lésion précancéreuse permet une meilleure efficacité de la thérapie future. Les chiens détecteurs de maladies assurent donc de meilleures chances de survie aux patients.

Les chiens d’alertes éduqués pour prévenir les crises d’épilepsie

Selon l’INSERM 600 000 mille personnes souffrent d’épilepsie et un tiers d’entre elles ne répondent pas au traitement.

De par les différents types, les multiples causes et symptômes, jusqu’ici aucun marqueur pour prévenir les crises n’avait été trouvé. Pourtant, prévoir le malaise épileptique est une priorité pour la sécurité du patient.
C’est pourquoi des chercheurs français et américains ont expérimenté l’hypothèse qu’un indicateur olfactif pouvait être dégagé avant les convulsions.

Dans cette étude, les chiens de détections entraînés ont donc reniflé des cotons imbibés d’odeur corporelle (sueur ou respiration) d’individu épileptique.

Les résultats sont étonnants. Pour les échantillons d’une même personne, les canins se figent devant les réceptacles contenant les effluves corporels recueillis lors de la crise et évitent les échantillons prélevés hors malaise. Avec différents patients, ils détectent ceux qui ont convulsé, de ceux qui ne souffrent pas d’épilepsie. Cette expérience prometteuse, démontre bien qu’il existe une signature olfactive commune aux différents types et symptômes de la maladie.

Grâce aux chiens d’alerte, nous pouvons enfin prévenir la crise éminente bien avant les signes cliniques. Le patient se met alors en sécurité, prend un médicament ou appelle les secours. C’est ce que réalise l’association Handi’chien qui a remis en 2018 son quatrième canidé d’assistance à un patient épileptique.  L’animal peut :

  • alerter son maître avec un « poke », c’est-à-dire un coup de museau, jusqu’à sept minutes avant le trouble ;
  • s’allonger à côté de la personne pour l’apaiser pendant le malaise ;
  • appuyer sur un bouton pour alerter la famille ;
  • aller chercher le téléphone ;
  • ramener des médicaments ;
  • aider la personne à se relever.

Face au caractère incontrôlable et au grand mystère qui entoure cette pathologie, le museau canin constitue aujourd’hui une solution de prévention indispensable pour les épileptiques.

L’odorat du chien dressé pour contrôler le diabète

Le diabète de type 1 est une maladie auto-immune. Elle touche des patients très jeunes. Leur production naturelle d’insuline est nulle. L’enfant doit donc contrôler quotidiennement son taux de sucre pour s’injecter tout au long de la journée sa dose. En cas d’oubli, ou d’activité physique intense, des crises d’hypoglycémie régulières peuvent se produire voire des malaises ou comas. Le patient et son entourage sont en état d’alerte constant créant anxiété et vulnérabilité.

C’est pourquoi les fondateurs de l’association ACADIA (Association de Chiens d’Assistance pour DIAbétiques) ont souhaité apporter une solution complémentaire gratuite, aux dispositifs médicaux de contrôle. Le meilleur ami de l’homme éduquait pour détecter les hypo et hyperglycémie.

En effet, selon l’étude scientifique menée par l’université de Bristol, 27 chiens ont repéré 83 % des 4 000 crises de diabètes, du panel testé. Grâce à son odorat, l’animal flaire les composés sécrétés lors des variations du taux de sucre dans le sang (catécholamine et acétone).

Les chiens sont formés par ACADIA pendant six à huit mois. Ils vivent d’abord avec un éducateur qui leur fait sentir quotidiennement des échantillons de sueur et de salive fournis par le futur patient. Une fois compétent, les familles accueillent l’animal dans leur vie quotidienne.

Le chien détecteur de diabète devient alors un acteur majeur dans la prise en charge de cette maladie. Il est capable :

  • de déceler la variation glycémique de l’enfant afin qu’il puisse s’administrer l’insuline ;
  • de prévenir en donnant un coup de museau ;
  • d’appuyer sur un bouton d’alarme, si la personne ne réagit pas ;
  • de diminuer le stress parental ;
  • de socialiser et de rendre autonome l’enfant ;
  • de sécuriser le patient.

La formation d’un chien d’alerte médicale remis gratuitement à une personne diabétique coûte 20 000 euros. Si vous aussi vous voulez participer à un projet qui a du sens, vous pouvez soutenir l’association Acadia en parrainant un chien.

Vous l’aurez compris, le meilleur ami de l’homme est aussi le meilleur ami de notre santé. Grâce au chien de détection, la communauté scientifique a compris que beaucoup, voire toutes les pathologies, avaient une signature olfactive. Cette révolution pour la recherche scientifique, est à l’aube de sauver des milliers de vies grâce au diagnostic précoce annoncé par la truffe canine. Ces compagnons à quatre pattes ne sont plus uniquement des assistants compétents, qui améliorent considérablement les conditions de vie et le confort des patients. Ce sont de véritables collaborateurs pour la recherche médicale. Leur odorat surpuissant est en train de transcender les retards de diagnostic et de combler les impasses thérapeutiques. En pleine crise sanitaire de la Covid-19, le chien pourrait bientôt apposer sa patte sur votre pass sanitaire. À quand votre prochain test olfactif canin ?

Laetitia Poncet

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