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Transidentité : répondre à l’argumentaire TERF

La démocratisation de la transidentité n’est malheureusement pas sans conséquence, une dangereuse rhétorique transphobe voit le jour, rhétorique contre laquelle il faut lutter ; il est urgent de répondre à l’argumentaire TERF (acronyme anglais signifiant Trans Exclusionary Radical Feminist, en français cela pourrait se traduire par l’expression Féministe excluant les personnes trans). En quoi les arguments employés par les mouvements anti-trans sont fallacieux ? C’est ce à quoi nous allons essayer de répondre tout au long de cet article.

Transidentité : répondre à l’argumentaire TERF - Le blog du hérisson

Transidentité : l’argument transphobe des stéréotypes de genre

Les TERFs n’hésitent pas à prétendre que la transidentité nuirait à la lutte contre les stéréotypes de genre : ces féministes transphobes prétendent n’avoir aucun soucis avec par exemple le fait qu’un homme veuille porter une jupe mais ont un soucis lorsque pour citer leur pensée cet homme en jupe se dit femme. Selon elles, le but du combat militant serait de normaliser le fait qu’un homme porte des jupes par exemple ou qu’une femme puisse vouloir faire de la boxe ou avoir les cheveux courts, ce que le mouvement transidentitaire empêcherait selon elles.

Cet argument est pourtant fallacieux ; le mouvement transidentitaire explique que le genre est construit socialement, c’est à dire qu’aux origines des sociétés humaines nous avons construit un roman social fictif sur les différents sexes biologiques (pénis et vulve principalement) en leur attribuant des places sociales et des rôles sociaux différents (homme ou femme, principalement) alors que rien ne justifie de façon naturel qu’on traite de façon différente une personne qui a un pénis et une personne qui a une vulve. En conséquent, le genre (être un homme ou une femme) ne repose en rien sur la biologie, mais sur la place sociale qu’on s’attribue (une personne qui a un pénis peut totalement incarner une place sociale de femme dans la société). Ce qui serait enfermant serait de vouloir forcer une personne qui est née avec un pénis à incarner socialement un homme, mais si l’on estime que n’importe qui peut incarner cette place sociale il n’y a plus rien d’enfermant.

► L’argument anti-trans des mauvaises causes des transitions

Une autre rhétorique employée par les TERFs serait que certaines personnes trans feraient une reconnaissance dans un genre autre que celui qui leur a été assigné à la naissance pour de mauvaises raisons : dans le cas des hommes trans (des hommes ayant été assigné femme à la naissance) ces raisons délétères seraient notamment un lesbianisme refoulé ou encore des traumatismes non résolus, c’est à dire que selon cette idée certains hommes trans auraient transitionné en homme car ils ne s’assumeraient pas en tant que femme lesbienne et préféreraient avoir une vie d’homme hétérosexuel, ou encore que ces hommes-là auraient subi des agressions sexistes avant d’être considérés comme des hommes et auraient donc préféré fuir leur condition de femme.
Dans un premier temps, notons que ces hypothèses manquent considérablement de preuves empiriques. Certains hommes trans sont gay dans leur genre d’arrivée, d’autres n’ont jamais vécut de traumatisme majeur. Et quand bien même, même si c’était vrai dans certains cas… Cette transition leur a été bénéfique et leur a permis d’acquérir une meilleure qualité de vie, quand on y réfléchit, quel serait le souci ?

Dans le cas des femme trans (des femmes assignées homme à la naissance), les TERFs mettent également en avant la cause d’une fuite de l’homosexualité dans le genre d’origine, mais aussi celle de l’autogynéphilie qui désigne une paraphilie sexuelle dans laquelle une personne est excitée sexuellement par sa condition de femme. Les anti-trans prétendent que certaines femmes trans ont entamé de changement de genre car elles ne supportaient d’être des hommes gay dans leur genre d’origine, ou encore qu’elles auraient fait une transition en étant motivée par une excitation sexuelle à l’idée d’être une femme. Pour le premier point évoqué, en plus d’une absence de preuve suffisante dans leur recherche pour expliquer l’ensemble des transitions des femmes transgenres, je noterais qu’à priori le seul but devrait être le bien-être des personnes, si ces personnes préfèrent à titre personnel se vivre dans la société en tant que femme hétéro plutôt que homme gay, quel est le soucis ? Quand au second point, nous pouvons y voir une forme de contrôle sur l’éventuelle sexualité de certaines femmes trans, nous viendrait-il à l’esprit de se demander quelles sont les envies intimes d’une personne cis et en quelle mesure elles impactent sa vie ?

Bref, il n’y a pas de mauvaises raisons de transitionner à priori, si cette démarche peut aider une personne d’une façon ou d’une autre, c’est l’essentiel.

► L’argument des détransitions

Un autre argument majeur employé par les TERFs est le potentiel risque pour une personne trans de regretter sa transition, avec une impossibilité de retourner totalement en arrière selon le degré de transition de la personne. Cette idée est encore une fois fallacieuse : les chiffres et les statistiques disponibles nous indiquent deux choses intéressantes, d’une part les détransitions sont clairement minoritaire, d’autre part et de surcroît elles sont souvent motivées par des facteurs extérieurs (transphobie de façon générale, discrimination, harcèlement…) ce qui est intéressant à noter.

En ce qui concerne ce point, voici quelques statistiques représentatives : une étude menée aux Etats-Unis rapporte que 82,5 % des détransitions sont dues à des facteurs externes pour seulement 15,9 % qui sont dues à des facteurs internes ; bien qu’il y ait peu d’étude ce sujet, les statistiques de retour en arrière se trouveraient dans une fourchette entre 1 % et 8 %.

Les différentes informations évoquées autour de la question de la transidentité permettent de répondre à l’argumentaire TERF : les idées employées par cette mouvance anti-trans manquent souvent de preuves (la détransition reste par exemple un phénomène mineure aux facteurs complexes), ou tirent de mauvaises conclusions (estimer que telle cause de transition est forcément néfaste par exemple). En revanche, ce que dit la science, c’est que la transition sauve la vie des personnes dysphoriques de genre (une partie des personnes trans).

Victoire Jouffre

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