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Comment tricoter est redevenu un geste politique

Grâce au tricot, de plus en plus de femmes (et d’hommes) revendiquent leur féminisme et leur volonté d’opter pour la slow consommation. Le regain d’intérêt actuel pour cette pratique chez les jeunes (et les moins jeunes) femmes du XXIe siècle est tel qu’il a entraîné la réouverture des merceries qui avaient progressivement disparu des villes, révolution française et une nouvelle tendance : les réunions dans des cafés ou dans des clubs pour tricoter ensemble autour d’un verre. Sans le savoir, ces adeptes reproduisent ce que faisaient leurs ancêtres du temps de la Révolution française : ces femmes qui se retrouvaient lors des assemblées révolutionnaires et écoutaient les interventions réservées exclusivement aux hommes, tout en déroulant leurs pelotes. Nous allons voir comment tricoter est redevenu un geste politique tant féministe qu’éco-citoyen.

Comment tricoter est redevenu un geste politique - Le blog du hérisson
©Margarida Afonso

Une activité respectueuse de l’environnement

Aujourd’hui, de nouveau, c’est grâce à cette technique millénaire que de plus en plus de femmes (voire même d’hommes), armé(e)s de pelotes et d’aiguilles, revendiquent leur volonté d’opter pour la slow consommation. On constate ce regain d’intérêt depuis environ une dizaine d’années avec la mode du Do It Yourself. L’art du tricot correspond aussi à une volonté de perpétuer des gestes ancestraux et de refuser la mode standardisée, avatar du capitalisme bourgeois et masculiniste, de surcroît écologiquement catastrophique. En effet, c’est une activité respectueuse de l’environnement. Acheter de la laine prélevée sans cruauté sur un animal et fabriquée en France, puis réaliser son propre modèle de pull-over ou de bonnet a un impact vertueux sur la planète et sur son estime de soi  : c’est la fierté d’avoir réalisé un modèle unique, un tricot qui ne vient pas de la grande distribution avec l’impact désastreux sur l’environnement que l’on sait…

Tricoter, un geste politique

Cette technique millénaire est aussi redevenue un geste politique, comme un clin d’œil aux tricoteuses de 1793, issues des milieux populaires. Elles  accompagnaient les sans-culottes dans les assemblées pour protester parce que rien n’avait été prévu pour elles dans la Déclaration des droits de l’homme et du citoyen et participaient aux débats, tout en tricotantAujourd’hui, de nouveau, cette activité allie revendication féministe et anticapitaliste. Pour Clara Becker, diplômée en études de genre, qui a fondé le Queer Tricot Club à Nantes, il s’agit, là encore comme pour ces révolutionnaires françaises, de se réapproprier le café, espace longtemps considéré comme masculin et de « s’approprier la féminité non seulement par des luttes, mais aussi par des gestes, un militantisme de l’intérieur. » En effet, tricoter est un acte d’empouvoirement très simple : de la laine, des aiguilles, des patrons en libre accès sur internet, c’est tout… D’ailleurs, il semblerait que même des stars masculines comme Antonio Banderas, David Duchovny ou encore Ryan Gosling, s’y soient mis.

Réjouissons-nous, car autrefois associées aux avortements clandestins et depuis, remplacées par les cintres brandis en opposition aux lois anti-IVG, les aiguilles ont retrouvé une image positive, comme en témoignent les nombreuses créations fièrement postées sur Instagram par les nouvelles tricoteuses connectées et politisées. Contre toute attente, tricoter est redevenu un geste politique ultra tendance !

Géraldine Vignaud

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