IA : avez-vous le complexe de Frankenstein ?
L’intelligence artificielle ne cesse de changer nos vies. Et plus elle y prend de place, plus elle inspire d’enthousiasme mais aussi de perplexité et d’inquiétude. En témoigne la vague de réactions à la sortie du controversé ChatGPT. Et vous, face à l’IA : avez-vous le complexe de Frankenstein ?
Le complexe de Frankenstein : quand la créature échappe à son créateur
Le XIXe et le XXe siècle ont produit dans l’humanité deux pensées antagonistes : d’une part, la foi dans le progrès grâce à la science, et d’autre part, la méfiance et la peur face aux dérives possibles de cette science.
Ainsi naquit l’un des thèmes les plus populaires de la science-fiction : une machine ou une créature artificielle, capable d’imiter l’homme jusque dans son intelligence, échappe à son créateur et se retourne contre lui (voire contre l’humanité tout entière).
L’écrivain américain Isaac Asimov appellera cette hantise : « le complexe de Frankenstein », en référence à la créature du docteur Frankenstein dans le roman de Mary Shelley (1818). La littérature, le cinéma et la télévision ne cesseront de broder sur ce thème, donnant naissance, entre autres, à l’angoissant superordinateur HAL dans « 2001, l’Odyssée de l’espace » (1968) et aux flippants « hubots » de la série suédoise « Real Humans » (2012).
Pourquoi ChatGPT nous fait peur ?
Dernière cible de ce complexe de Frankenstein : l’intelligence artificielle. Objets connectés, algorithmes de Google et des réseaux sociaux, générateurs d’images et de textes : l’IA est présente partout dans notre quotidien. Ces machines traitent, interprètent et génèrent des données dans des quantités et à une vitesse inouïes. Leur mission : être capable de prendre des décisions complexes comme le ferait un humain… Mieux qu’un humain.
ChatGPT, l’« agent conversationnel » de la société OpenAI a provoqué, depuis sa sortie fin 2022, une avalanche de réactions inquiètes devant la menace économique, éthique et épistémique qu’il représente.
Inquiétude justifiée ? Pas forcément, nous dit Erwan Lamy dans un article publié sur le média en ligne « The Conversation ». Selon lui, ChatGPT est programmé pour produire du contenu crédible mais pas forcément vrai. Il risque donc de devenir un simple (mais talentueux) « générateur de “bullshits” ».
Mais de ce mal, explique le chercheur, « pourrait naître un bien ». L’usage généralisé de ChatGPT peut nous inciter à développer notre volonté et notre capacité à discerner le vrai du faux, de même que les “deepfakes” nous ont appris à porter un regard plus critique sur les images diffusées par internet.
L’IA pour challenger l’intelligence et l’éthique humaines ? Pourquoi pas ? La revanche du complexe de Frankenstein.
Véronique Hamon
IA : avez-vous le complexe de Frankenstein ?