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Toledano-Nakache, cinéastes humanistes

Éric Toledano et Olivier Nakache se sont peu à peu imposés comme des figures majeures du cinéma français. En sept films, le talentueux tandem a collaboré avec une pléiade d’acteurs et d’actrices de renom ainsi que des compositeurs de génie. Cinéastes humanistes, Toledano-Nakache proposent des films haut de gamme à la portée de tous, parfois durs, rudes, abrupts, mais toujours empreints d’une infinie tendresse, d’une immense sensibilité et d’un humour ravageur. Le duo magique distille des valeurs universelles et instille une lueur d’espoir dans chacune de ses réalisations.

Toledano-Nakache : des cinéastes humanistes - Le blog du hérisson
©William Beaucardet / JDD

L’art du vivre-ensemble

• En colo

Après un honnête galop d’essai avec Je préfère qu’on reste amis, dont les réalisateurs confient qu’il n’est “pas assez personnel”, Éric Toledano et Olivier Nakache connaissent leur premier succès grâce à Nos jours heureux. Les deux hommes puisent dans leurs souvenirs communs d’animateurs de colonie de vacances et troussent avec nostalgie une comédie sincère et jubilatoire. Le duo fictif du premier long métrage laisse place au film choral, format faisant la part belle au vivre-ensemble. Les querelles et liaisons s’entremêlent à l’intérieur de ce microcosme épicé. Chez Toledano-Nakache, le septième art se conçoit en bande, en groupe, en famille.

• En famille

Leur film suivant, Tellement proches, se veut une réflexion générale sur les relations familiales vues sous l’angle de la comédie. Géraldine Nakache, cinéaste reconnue, dit de son frère Olivier et de son complice Éric Toledano qu’ils “radiographient les gens en permanence”. Au-delà de leurs expériences respectives du mariage, de la paternité et des belles-doches, les deux compères interrogent ainsi un thérapeute familial sur les problèmes fréquemment rencontrés dans ce contexte. D’un contenu parfois tragique, Toledano-Nakache tirent une fiction comique en s’inspirant de réalisateurs tels que Claude Sautet, Yves Robert ou Cédric Klapisch.

• Au travail

D’abord animateurs de colo, Éric Toledano et Olivier Nakache ont multiplié les petits boulots afin de financer leurs premiers courts métrages. Dans Le Sens de la fête, le duo scrutateur photographie un mariage du point de vue d’une brigade menée par le regretté Jean-Pierre Bacri, qui dit des réalisateurs : “On est de la même famille.” Le film, très collectif, offre une immersion dans le monde du travail. Comme toujours, l’humour et le drame coexistent. Dans un contexte d’angoisse existentielle dû aux attentats de 2015, Toledano-Nakache proposent le vivre-ensemble en guise de réponse et préconisent la coordination dans une métaphore musicale.

Des comédies engagées

• Le handicap

Cinéastes engagés sans être militants, Éric Toledano et Olivier Nakache abordent des sujets forts tels que le handicap, les sans-papiers ou l’autisme, toujours par le prisme de la comédie. Tiré d’une histoire vraie, Intouchables est le chef d’œuvre du tandem, tout y est juste, fluide, léger, du récit à la partition. Dans une confrontation entre handicaps social et physique, le fauteuil fait face à la banlieue, deux mondes hermétiques se rencontrent et se complètent. Délaissant leurs propres vies, nourris d‘une France multiculturelle, Toledano-Nakache posent un regard humaniste, prônent le rapprochement entre les êtres et polissent l’esprit de leurs spectateurs.

• Les sans-papiers

Après le triomphe planétaire d’Intouchables, le duo en or du cinéma français évoque le thème plus dur des sans-papiers dans Samba, adapté d’un ouvrage. Refusant les classifications pour eux-mêmes comme pour leurs personnages, Éric Toledano et Olivier Nakache réalisent une comédie à la fois sociale, romantique et dramatique où ils se focalisent sur la trajectoire d’un homme. Si le sans-papiers n’est pas fantasmé, le solaire Omar Sy parvient à créer de l’empathie envers une figure habituellement rejetée. Toledano-Nakache livrent également une réflexion sur l’épanouissement dans le travail à travers cette incursion dans le milieu associatif.

• L’autisme

Le puissant et poignant Hors Normes met en lumière le travail et l’engagement de deux associations auprès de jeunes autistes. Forts d’une enquête de terrain, Éric Toledano et Olivier Nakache explorent un îlot d’humanité où des mômes de quartiers difficiles s’occupent de cas dits “hyper complexes”. Autisme et altruisme se rencontrent. Dans ce film composite où les acteurs côtoient de vrais encadrants, de vrais référents et de vrais enfants, Toledano-Nakache questionnent les notions de norme, de marge et proposent une redéfinition. À rebours d’une société pessimiste, les cinéastes humanistes braquent leurs projecteurs sur des super-héros du quotidien.

Les orfèvres du septième art ont désormais cédé aux sirènes de la série à succès mais demeurent fidèles à leurs thèmes de prédilection. En thérapie, adaptation d’une fiction israélienne, ouvre les portes de l’écoute dans un cabinet de psychanalyse au lendemain des attentats du 13 novembre. Il se murmure par ailleurs que Jean Dujardin pourrait figurer au casting d’un prochain long métrage, le public se languit. Éric Toledano, Olivier Nakache, je préfère qu’on reste amis, tellement proches, songer à nos jours heureux, avec le sens de la fête, sur un air de Samba, vous êtes hors normes et intouchables.

Georges Latchimy

→ Intouchables – Scène de l’opéra

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